01 juillet 2014

Assemblée Plénière du 27-6-14 "Réforme Territoriale"

Intervention Eric Durand



 Exercice difficile pour les élus EELV que celui d’analyser le bien-fondé de cette réforme. En effet, elle contient un grand nombre de revendications que portent les verts depuis de longues années :
- Suppression des conseils généraux
- Renforcement du rôle des régions, avec compétences élargies
- Rôle prescriptif des schémas

En même temps, tant par la méthode que sur certains parti-pris, nous avons un certains nombres de critiques à formuler sur cette proposition de réforme, mais nous souhaitons ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain. Nous ne souhaitons pas ne pas laisser passer l’occasion d’une réforme essentielle sous le prétexte qu’elle ne nous convient pas totalement. Nous avons, enfin devant nous une réforme territoriale qui marque la rupture et qui sera qualifiée de courageuse si elle est menée à son terme.

Les écologistes prônent depuis de longues années le renforcement du rôle des régions pour qu’elles soient fortes, autonomes, capables de déterminer de nouveaux modèles de développement, qu’elles aient de véritables compétences. Mais des régions fortes ne nécessitent pas forcément des régions grandes, des régions peuplées. Les länder allemands ne sont-ils pas plus petits et parfois moins peuplés que certaines de nos régions actuelles ? Et pourtant ils jouent un véritable rôle au sein de la république fédérale et dans l’Europe car ils sont dotés de fortes compétences, de pouvoir législatif et de capacité d’innovation. Pourtant le choix s’est porté en premier lieu sur la fusion de territoire, décidé rapidement et monopolisant le débat sur l’enjeu de cette cohabitation des territoires. Alors que la vraie question ne porte pas sur la taille, qui importe peu, mais bien sur les moyens et compétences qui leur seront donnés.

Nous regrettons que le choix de cette réforme ait été annoncé précipitamment et sans réelle concertation. Nous regrettons également que le découpage des territoires et la fusion des régions aient été décidés dans un bureau à Paris, comme pour acter que le jacobinisme prévaut toujours, même sur une loi voulant élargir le rôle des régions, et acte une étape importante de la décentralisation. Nous comptons sur le travail législatif qui va suivre ces annonces, à moins que les parlementaires décident de bloquer la réforme, plutôt que l’amender, comme les sénateurs ont semblé vouloir le faire hier en repoussant l’examen du projet de loi.

Comme nous l’avons dit, c’est bien le rôle et la fonction qui seront donnés aux régions qui nous importent et c’est sur ce sujet qu’il faut travailler. La place des régions dans l’organisation politique nationale et européenne passera par de nouveaux moyens financiers pour lesquels nous n’avons pas de lisibilité.
 Il faut que des moyens propres soient donnés aux régions et qu’ils soient dynamiques. J’évoque là, la fiscalité avec un besoin d’autonomie fiscale.
Des moyens juridiques devront également nous être donnés car selon le projet de loi, les régions devront se doter d’outils prescriptifs, et nous saluons cette véritable avancée. En effet, le SRADDT, qui rassemble tous les schémas, sera prescriptif et, même s’il sera élaboré en concertation avec les autres collectivités, il nous faudra bien nous doter d’outils juridiques afin de veiller à son application.
Le renforcement du rôle des régions et de leurs moyens doit passer par un transfert des compétences de l’état, mais aussi par une simplification des strates territoriales.
 Les suppressions des conseils généraux ou départementaux comme on les nomme désormais, que nous appelons de nos vœux depuis longtemps, est inscrite dans le projet de loi, et la réforme n’aura de sens que si elle supprime à terme cet échelon. Nous craignons que la réforme soit inachevée et que d’ici 2020, la suppression des conseils généraux ne soit pas effectuée.

La suppression de la clause générale de compétence n’a aucun sens dans cette perspective de suppression des conseils généraux. Nul risque en effet, d’avoir un empilement des subventions puisque les collectivités se résumeront entre le bloc communal et la région. Sa suppression dès 2016 ne serait-il pas l’aveu du renoncement de la suppression des conseils généraux ? Cette clause doit être maintenue au niveau de la région, elle permettra une adaptation des politiques de chaque région aux exigences de leur territoire, ainsi les régions s’approcheront d’un fédéralisme différencié que nous revendiquons depuis de longue date comme Marc Borneck l’a évoqué tout à l’heure.
 Dans ce contexte, il nous apparaît dangereux de supprimer le droit aux régions d’intervenir sur des politiques diverses, d’une part cela les prive de leur capacité d’innovation et cela fait peser un important risque sur le secteur associatif, la santé, l’environnement, l’éducation populaire, la culture.
Cette autonomie des régions à intervenir sur des politiques qu’elles jugent importantes ou qui risqueraient d’être orpheline de toute aide publique,doit être revendiquée par nous tous. C’est aussi un moyen de maintenir une proximité sur ses territoires. Une proximité, qui ne devra pas être confondue avec clientélisme, sera indispensable compte-tenu de l’élargissement des territoires de l’institution régionale et de la disparition des conseils généraux.

La législation devra en parallèle renforcer l’échelon intercommunal de façon à garantir une approche territoriale construite à l’échelle des bassins de vie. Le projet de loi est à ce titre inquiétant à nos yeux car il fixe un seuil de 20 000 habitants pour une intercommunalité alors qu’il faudrait conduire une véritable analyse qualitative des réalités territoriales prenant en compte les « aires urbaines » du milieu urbain et les « bassin de vie » pour les zones rurales afin de définir leurs périmètres.
Nous nous rapprochons du périmètre des Pays sur lesquels il faudrait sans doute s'appuyer. Il est évident que les communautés de communes actuelles pour la plupart d'entre elles, ne répondent pas à ce besoin institutionnel de proximité suite à la vacance laissée par la disparition des conseils généraux.

L’interrogation existe là aussi sur le véritable statut, les moyens et les compétences données aux intercommunalités :
- Elle devrait porter la compétence générale plutôt que les communes
- Bénéficier d’une intégration financière (fiscalité/ dotation)
- Etre dirigée par une assemblée élue au scrutin direct

 Comme vous l’avez compris, nous attendons beaucoup de cette réforme qui marquera sans aucun doute une étape importante dans la vie institutionnelle de notre pays, pour peu qu’elle soit menée à son terme.

Nous élus régionaux, devons réclamer que nous soit enfin donnés les moyens de conduire nos concitoyens francs-comtois et bourguignons vers un avenir qu’ils souhaiteront tel qu’ils l’auront exprimé lors des élections. Car la fusion entre la Bourgogne et la Franche-Comté ne suffira pas pour nous donner les moyens d’agir.
La superficie ne fait pas la « taille critique », terme souvent utilisé par les zélateurs de cette réforme. Nos deux régions restent des régions peu peuplées, ayant des PIB/habitant les plus faibles de France et la fusion de 2 ensembles vides constitue toujours un ensemble vide, à moins que l’on nous donne les vrais moyens de les remplir et d’agir avec de vraies compétences et de vrais moyens financiers.

Il faudra bien entendu s'appuyer sur nos concitoyens, et les consulter sur ce sujet au plus vite. Vous l'avez évoqué, Madame la Présidente, la nécessité d'un débat territoriale participatif. Il nous parait en effet que seule cette appropriation du débat par les franc-comtois et les bourguignons, nous fera éviter les tentations de repli sur soi, identitaires, et donnera à chacun des habitants de nos régions une vraie confiance dans l'avenir de leur territoires et en, leurs dirigeants.

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